Profondeur de la lettre et sens spirituel : l’humanité des Ecritures

Revue Théologique des Bernardins, n°3, octobre 2011, p. 27-45

Les mots de « lettre » et « esprit » résonnent spontanément pour une conscience chrétienne de l’affirmation de 2 Co 3, 6 selon laquelle : « La lettre tue, mais l’esprit vivifie. » Par cela il semblerait que tout soit dit, sans appel, au détriment de la lettre. Mais on sait que cette formule paulinienne, à laquelle sa forme lapidaire confère une efficacité qui peut être redoutable, concerne avant tout ce qui advient à la révélation du Premier Testament dans l’événement du Christ : en lui « toutes choses sont faites nouvelles » (cf. Ap 21, 5), le passé est arraché à sa vétusté, la vie dans la puissance
de l’Esprit est victoire sur le péché et sur la mort. Se fermer à cette reconnaissance, dit Paul, revient à s’enfermer dans une littéralité mortifère. Pourtant, si en ce sens précis la formule a bien rapport au plus décisif de la confession de foi chrétienne dans son rapport aux Écritures, elle n’épuise pas tout ce que contient le couple lettreesprit, ne serait-ce que parce que le message du Nouveau Testament se formule encore dans une lettre… En amont des mots de Paul, il y a donc place pour une réflexion qui continue à questionner ces termes clés déterminant l’économie de l’Écriture, dont notre temps aime rappeler, sous l’inspiration de Dei Verbum, qu’elle est « l’âme de la théologie » (DV 24). Ce qui implique de clarifier périodiquement ce que l’on engage précisément dans cette référence en laquelle l’activité théologique est appelée à reconnaître sa source et sa vérification.